Dans un café honfleurais...

Dans ce café règne en permanence une atmosphère de fête. Dehors, sur le quai, face au Vieux Bassin reflétant en ses eaux tranquilles les belles lueurs du soleil estival, des centaines de touristes profitent de la soirée, affalés sur leurs chaises d'osier. La chaleur, accablante mais agréable malgré tout, exerce son envoûtement sur les corps et sur les esprits...
Le quai Sainte-Catherine baigné de lumière resplendit, animé par un ballet incessant de promeneurs qui semblent s'adonner sur les trottoirs à des danses rituelles aux signification mystérieuses. Au-delà de la zone réservée aux piétons, les voitures fusent et contournent le Vieux-Bassin, ce coeur de la ville autour duquel gravite chaque mobile. Les pare-brises reflètent la lente agonie de l'astre du jour finissant qui domine, tout là-haut, les têtes échauffées. Samedi soir, fin de semaine, ultime exaltation avant le septième jour consacré au repos...

A l'intérieur du café, on discute allégrement. La climatisation y empêche l'engourdissement observable sur les terrasses, domaine du farniente. Les serveurs se croisent et s'entrecroisent. Par quel prodige ne se choquent-ils jamais? Les tables ne sont pas si éloignées les unes des autres et la circulation se fait difficilement. Tout est disposé ici pour se fixer et discuter longuement autour d'un verre ou d'un plat. On ne peut demeurer longtemps debout, si ce n'est pour attendre qu'une place se libère, ou bien pour partir. Il y a bien le bar, au fond, où l'on peut rester debout autant qu'on veut, en sirotant un breuvage de circonstance : le verre de l'amitié ou le philtre d'amour, le toast de politesse ou le cocktail détonant.
Dans toute la salle, on parle, on discute, on piaille même parfois. Des cris et des éclats de rire retentissent sur fond de bourdonnement incessant. De toutes ces bouches s'échappent des mots qui se mêlent à la fumée en d'étranges phylactères. Par salves labiales tirées en continu, chacun y va de son propos, de sa bonne histoire, de son récit immanquable et extraordinaire. Et l'on rit, l'on s'esclaffe, l'on s'exclame.

Une femme claque dans ses mains comme pour arrêter le temps. En vain, évidemment! Au mieux, elle a tué un moustique. Mais c'est en le faisant avec des baguettes chinoises qu'elle ferait mouche, car selon une légende, quiconque est en mesure de réaliser ce prodige - attraper une mouche au vol avec des baguettes, comme ça, d'un coup sec - est capable de tout.
A droite, un homme conserve son quant-à-soi, mais son regard trahit la houle qui se déchaîne en lui : il est parti à l'assaut pour séduire son interlocutrice, et les hostilités ne font que commencer...


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